Sexe sans x, sans y non plus.
« Bien rares sont ceux qui, ayant changé de direction, ne passent pas la première partie du nouveau parcours à regarder par-dessus leur épaule « John Steinbeck. Le principe d’égalité homme femme que l’on pose comme règle de droit et comme habitude de vie dans nos sociétés modernes n’arrive pas à s’imposer dans les cœurs et les usages de ses défenseurs.
L’homme reste le modèle déterminant dans la conduite de la politique de la cité et dans la formation identitaire du couple. À tous les étages de la pyramide sociale, la virile position impose son monopole et sa stratégie de domination. L’école maternelle et primaire en oubliant volontairement la parité dans ses recrutements prépare dès le plus jeune âge à cet inconscient collectif.
On demande d’une petite fille qu’elle soit soignée et peu bavarde, on pardonne la mauvaise écriture et le chahut chez les garçons. .Ce déterminisme inconscient perpétue les clichés traditionnels de domination. L’homme travaille, la femme garde les enfants.
La levée de boucliers contre la garde alternée qu’un juge devrait prononcer en priorité dans les procédures de divorce est révélatrice de cette guerre larvée des sexes. Ni les femmes, ni les hommes ne souhaitent que soit remise en cause leurs prérogatives réciproques.
Pour les femmes, on pourrait entendre un « Touche pas à mes gosses et pour les hommes « Ne touche pas à mon foot !» Le formatage est tel que la sempiternelle égalité professionnelle ne se résume souvent qu’à la valorisation de quelques femmes soldates revêtant les habits du père Fouettard pour mieux se mesurer à l’ambition naturelle du mâle. Les détracteurs de Madame Taubira ne sont pas seulement racistes, ils sont sexistes. On reproche à cette femme d’être intelligente et de ne pas servir la soupe à ces messieurs. Sa posture et ses idées vont à l’ opposer de la traditionnelle addiction à la testostérone et c’est ce qui fait qu’elle cristallise à ce point l’opinion publique.
L’imaginaire du couple prend en compte ce formatage familial et éducatif pour reproduire à l’infini ce rapport de dominant -dominé, laissant peu de place aux évolutions législatives. La France est le pays du nord de l’Europe le plus en retard sur les rapports homme femme. L’intime étouffe toujours la sphère publique. Toutes les lois ne peuvent pas grand-chose lorsque l’opinion publique est formatée et programmée pour ne pas évoluer. Il en va des hommes et des femmes, mais aussi de leurs rapports à l’environnement ou à l’impôt.
Tant que l’école n’amènera pas en son sein un idéal de l’égalité homme- femmes, les bonnets rouges feront loi sur les bonnets C !
Igor Deperraz
photographie Igor Deperraz