Zut ou Zep !!!!
À la seule évocation du mot ZEP, l’opinion publique comme l’ensemble des partenaires du système éducatif fronce les sourcils. Un peu comme ci l’on voulait transformer en station balnéaire les banlieues françaises en y mettant les moyens.
Les objectifs chiffrés de la réforme engagée par Vincent Peillon ont de quoi séduire. Décharge de service d’une heure trente pour les professeurs du second degré, décharge de 9 jours pour le primaire et une prime qui devrait passer de cent euros à deux cents euros par mois. L’autre volet de la réforme est de faire de ce terrain difficile et complexe, le lieu privilégié de l’innovation pédagogique. Un corpus qui a le mérite d’apporter temporairement une réponse chiffrée à ce problème endémique de la société française. Les questions seront loin d’être réglé par ce ballon d’oxygène.
D’une part la carte scolaire colle à la sociologie des banlieues et concentre en ces lieux d’exclusion une population fragile et déstructurée, d’autre part comme l’affaire de « la terreur de limoge » le montre, les réponses de l’État sont souvent impuissantes face au déficit de repère des jeunes livrés à eux même.
Ponctuellement, ces efforts ne seront pas inutiles pour maintenir à flot ce navire à la dérive.
Que représentent deux cents euros lorsque l’on doit enseigner la peur au ventre ou que l’on doit affronter quotidiennement les insultes feutrées et déguisées d’une partie minoritaire des élèves. L’éducation nationale n’est pas la bonne mère nourricière qui peut tout. Sans la volonté collective de remettre de l’ordre républicain dans les rouages de la société, il n’y aura aucun progrès significatif en ZEP .Tout se passe aujourd’hui comme si l’on oubliait que les « enseignants » ne sont pas des éduquants. Ce rôle revient traditionnellement aux éducateurs et aux assistantes sociales. La punition ou le respect de la loi sont du ressort de l’autorité policière et judiciaire…
Hors si l’on constate que la police est impuissante face aux adolescents et que les magistrats ne trouvent pas de réponses graduées… Comment l’éducation nationale pourrait faire office d’éducateur, force de l’ordre et juge moral… Demande t- on aux policiers de faire la classe aux adolescents placés en garde à vue ou aux magistrats de passer du temps pour apprendre la politesse aux jeunes en détresse.
Le fait même que l’on accepte dans la république l’existence de ZEP, avec des moyens spécifiques et la possibilité d’expérimenter des innovations pédagogiques est en soi un constat d’échec de la politique d’égalité des chances.
À trop vouloir jouer sur le levier des moyens, on finit par oublier que la République se construit avant tout sur des valeurs. Dans cette réforme, on les cherche en vain…
Igor Deperraz