Regardez-moi
Daniel Larribe, détenu en otage dans le Nord Mali apparaît sur une vidéo en date du 8 septembre .Il est face à la caméra, le visage creusé et expressif. En arrière plan des Kalachnikovs, celles qui font rêver les gamins de banlieues. Cela pourrait être demain à Marseille ou Grenoble, c’est au Mali. Les revendications d’AQMi ne sont là que pour la mise en scène. L’argent et la passion des armes à feu sont en réalité les seules motivations de ces hommes désœuvrés et déficients. Pour effacer ce qu’ils ne souhaiteraient pas faire subir à leur père ou leur fils, ces hommes montrent leur proie, comme du gibier .
Trophée de chasse pathétique. La réalité de l’otage, c’est les vêtements souillés, les moustiques, l’humiliation et l’interminable attente d’une fin. Il n’y a aucune esthétique de l’image. En regardant Daniel Larribe, face à cette caméra voyeuse, je ne pouvais quitter le regard de cet homme à la merci de la grande absurdité humaine. Il y a comme ça des visages qui vous obsède, vous hante dans votre confort quotidien.
J’ai découpé sa photo et l’ai posé sur mon bureau, sous une pile de documents pour ne plus le quitter des yeux. Je ne le vois pas mais j’y pense. Une façon très puérile, presque enfantine de lutter contre un monde en armes. Qu’ils soient d’Alep du Mali, de Marseille, les porteurs de Kalachnikov mettent la terreur en image pour mieux cacher leur animalité. L’expression d’un déséquilibre inquiétant entre les nantis et les démunis. Igor deperraz
photographie igor deperraz