Le livre de poche souffle ses bougies
60 ans de livre de poche et plus d’une ride. Le papier jauni sorti des imprimeries Brodard et Taupin de La Flèche n’est plus le vecteur principal de démocratisation de la lecture.L’entreprise qui nous fit rêver avec les ouvrages cartonnés du club des 5 affiche toujours 150 millions de chiffre d’affaires. L’avenir des livres de poche semble troué sans le plomb des bas de casse. Le poche n’a pas comme pour le microsillon su imposer son format universel .il s’assemble sur nos bibliothèques en vrac, créant sur cet espace linéaire une vague irrégulière et chaotique.
La poussière gagne la cime des pages et imprime comme pour les arbres des cercles concentriques infinis. La grande révolution du poche est peut être moins dans son format que dans son ostensible volonté de supprimer la reliure traditionnelle des chaînes d’impression. 60 ans après, le Saint Exupéry de 1963 se détache malicieusement de la tranche pour s’approprier une division en trois chapitres décollés. Les yeux cherchent la lumière d’août en nu ou texte intégral. Le mauvais caractère ignore l’accent sur le« A » majuscule comme pour nous inviter à plus de modestie.
Le livre de poche a ouvert la voie au fast Food de la littérature en multipliant les succès de gare comme le célèbre SAS. Le format s’était déjà implanté dans le paysage des libraires avec la série noire baptisée par Jacques Prévert. La tablette numérique reprend largement ce concept poche. Il ne lui manque plus que le son de la feuille qui crisse lorsque l’on la tourne .Un gadget qui reste à inventer en attendant de souffler les bougies qui consumeront définitivement l’âge d’or du livre
Igor deperraz