Sous le sable, nos égoïsmes
Si l’or ou le pétrole sont des matières premières qui ne laissent pas indifférentes à l’énonciation de leur nom, le sable quant à lui n’avait pas soulevé jusqu’à aujourd’hui l’ombre d’un questionnement. On imaginait ces grandes étendues du Sahara ou ces grandes plages du nord envahi par ce milieu granulaire collisionnel.
Il n’en était rien ! Le sable de mer se raréfie et s’exporte comme une quelconque roche sédimentaire détritique. Les barrages sur les fleuves, les ouvrages d’art luttant contre l’érosion naturelle des côtes et des dunes tarissent la source naturelle de renouvellement de ces petits grains de quartz et d’oxyde de fer. La demande en sable est devenue tellement sensible que l’on construit des flottes de bateaux pour aller sucer en mer la précieuse richesse en détruisant par la même occasion toute la biodiversité des fonds sous-marins. Des mafias et des pilleurs de sable travaillent comme des fourmis à la ponction de ce matériau de Mohr Coulomb.
Un phénomène de roulement des grains sur eux même qui amène la disparition des plages et la désertification d’une bande littorale qui a mis des millions d’années à se construire. Nous sommes en train de programmer la fin du sable sur nos plages et nos rivières. Les châteaux de sables de demain seront réalisés sur des surfaces plastiques mélangeant le verre pilé imitant sa couleur et sa texture.
Posséder dans un petit sac de toile à sa ceinture sera bientôt considéré comme un signe extérieur de richesse et il est à parier que des armées de spéculateurs ont commencé à stocker la précieuse marchandise pour bâtir sur du sable leur fortune de demain. Le marchand de sable est bel et bien passé sur nos espérances de plage romantique, livrant ses couchers de soleil sur le lit de nos rêveries ! Le monde de demain sera sans et ressemblera plus au sol lunaire qu’aux cartes postales du début 21 siècles.
Notre génération aura eu bien du sable dans les yeux !
Igor deperraz